top of page
  • Photo du rédacteurNicolas Szafranski

Sinister

Scott Derrickson aime le cinéma de genre ; les esprits, les démons, les contorsionnistes du Cirque du Soleil. Mais c'est aussi un réalisateur plutôt inégal. Je conserve un bon souvenir de L'Exorcisme d'Emily Rose, et j'ai trouvé qu'il s'en était plutôt bien sorti avec Doctor Strange. Par contre, son remake de Le jour où la Terre s'arrêta est à jeter aux oubliettes, et Delivre-nous du mal est chiant comme la pluie. Dans cette filmographie boiteuse, Sinister apparaît comme son film le plus réussi.



Sinister n'est pourtant pas parfait. Le réalisateur ne fait pas montre d'une grande subtilité dans le fantastique, refusant à jeter le trouble sur la nature des incidents qu'affronte Ellison. Jamais on ne doute du caractère surnaturel des manifestations se présentant à lui, alors qu'un certain nombre de levier (sa consommation d'alcool, son obsession pour l'affaire) pouvait être actionné afin de brouiller leur réception. De même, le film ne creuse pas assez l'intériorité de ce personnage, comment sa profession (auteur de true-crime), son obsession (celle de renouer avec le succès littéraire de ses débuts) et son intérêt pour les sujets macabres la construisent. J'ai eu comme un goût d'inachevé en bouche sur ce point.


Néanmoins, j'apprécie beaucoup Sinister. Le sentiment d'angoisse qu'il avait fait naître en moi la première fois est encore présent, et la terreur que ces fameux films de famille inspire est toujours intact. Cette peur ne vient pas seulement de la chose filmée (chaque "home movie" présentant l’exécution d'une famille), mais également des moyens employés pour la filmer. Le format Super 8, cette image sale et granuleuse, cette camera subjective, ce hors champ, et la question que ce dernier soulève ; qui est la personne derrière la caméra ? Blumhouse, le studio derrière Sinister, a bâtit son empire sur le cinéma found-footage, du faux documentaire au dimension vériste, avec cette interminable saga que fut Paranormal Activity. Dans ces productions, comme dans bien d'autres du même genre, la personne qui filme subit les événements. Elle est passive. Mais Scott Derrickson fait ici de son filmeur, un acteur. Ces bobines sont le regard du meurtrier. Et c'est là que naît le malaise. Un malaise accru par le travail exceptionnel du compositeur Christopher Young, qui propose une partition toute en dissonance. Enfin, Ethan Hawke comme à son habitude, livre une interprétation fiévreuse, apportant de la sympathie à un personnage pourtant antipathique sur le papier.


Sinister ne restera pas dans les annales du genre. Mais il aura toujours une belle place dans ma mémoire de cinéphile.

0 commentaire

Posts récents

Voir tout
bottom of page